Au cœur de l’été dernier, le quartier Saint-Georges, dans le 9e arrondissement de Paris, a été le témoin d’une transaction ultra confidentielle au 45 rue de la Bruyère. Selon nos informations, le (très) sélect Soho House Paris – un établissement de 36 chambres qui a ouvert ses portes en 2021 au cœur Pigalle – a été repris par Amundi Immobilier, agissant pour le compte de deux de ses SCPI (Rivoli Avenir Patrimoine et Edissimmo). « Un institutionnel pour le moins inattendu sur cette typologie d’actif, mais force est de constater qu’il avait besoin de déployer un volume important de capitaux récolté ces derniers mois », observe un spécialiste du secteur hôtelier de la capitale. À la vente de cet ensemble prime, l’on retrouve la Compagnie de Phalsbourg. Mis sur le marché début 2022 par le biais d'un appel d'offres classique emmené par la banque d’affaires Rothschild & Co – et avec pour nom de code "projet Cocteau" –, Soho House Paris a attisé les convoitises d’investisseurs institutionnels, de fonds américains et moyen-orientaux, ainsi que des privés. Le signing final de cette opération s’est tenu en septembre dernier. Une promesse de vente avait été signée en juillet, juste avant la remontée des taux. De sources concordantes, Amundi Immobilier n’était pas le mieux disant en termes de prix – la société de gestion emmenée par Marc Bertrand est arrivée en deuxième position –, mais a fait l’unanimité côté cédant pour son respect de l’actif et son ADN.
2,5 M€ la clé
Même si le Soho House Paris ne coche pas les cases de l’hôtellerie du luxe, sa valorisation tend à se rapprocher des prix standards d’un palace parisien. D’après nos informations, ce trophy asset de 3 757 mètres carrés certifié Breeam In-Use very good a été rétrocédé contre un ticket de 93 M€ – soit 2,5 M€/clé – et un taux de rendement de près de 4 %. « Ce niveau de valeur, pour un actif qui coche davantage les cases de l’entertainment que l’hôtellerie pure, crève les plafonds du marché hôtelier haut de gamme de la capitale en 2022 », estime un broker. Dans le détail, Amundi Immobilier a repris l'actif pour 70 M€ via Rivoli Avenir Patrimoine et 23 M€ au travers de Edissimmo. « Le Soho House Paris est un concept hôtelier innovant qui répond à de nouveaux besoins et de nouvelles attentes en matière d’hospitalité, relate Marc Bertrand, directeur général de la société de gestion. Cette acquisition s’inscrit parfaitement dans notre stratégie de diversification, tout en restant sur des actifs qualitatifs, répondant à des critères de centralité dans des villes de premier plan en Europe. »
Plus de 50 M€ de capex
De mémoire, la Compagnie de Phalsbourg avait racheté cet hôtel particulier du XIXe siècle – là où vécut la famille du poète Jean Cocteau avant d’abriter le siège de l’Alliance israélite universelle – en 2016 contre plus 7 000 €/m2 avant de réhabiliter. Le montant des capex s’est élevé, pour la période 2019-2021, à plus de 50 M€ selon nos sources. À noter : ce projet a été financé depuis son acquisition par un pool bancaire constitué de BNP Paribas et CIC. « Nous sommes très heureux d’avoir fait venir Soho House à Paris, le concept hôtelier le plus innovant de ces vingt dernières années. C’est un succès éclatant et une vraie fierté pour la Compagnie de Phalsbourg qui ouvre d’autres perspectives en Europe avec Soho House et marque notre premier partenariat avec Amundi Immobilier », réagit Philippe Journo. Le président-fondateur de la Compagnie de Phalsbourg a en effet un second projet avec Soho House (4 500 mètres carrés) à Lisbonne au Portugal.
3,7 M€ de loyer facial
Pour trouver chaussure à son pied, le fondateur de Soho House, Nick Jones, a parcouru pendant cinq longues années les artères de la capitale avant de poser ses valises au 45 rue de la Bruyère et ses trois édifices bâtis à des époques différentes (XIXe siècle, dans les années 1940 et contemporain). Toujours d’après nos informations, il s’est engagé sur cet ensemble via un bail de 12 ans et un loyer facial de 3,7 M€. Fruit d'une collaboration entre Soho House Design et la Compagnie de Phalsbourg – sans oublier Perrot & Richard en tant qu’architectes – cet établissement éclectique, imaginé comme une maison de famille cool chic et bohème, abrite également un restaurant, un cabaret, des bars, un bassin en rooftop, ainsi qu’une salle de sport avec sauna et hammam. Le concept ici déployé demeure identique au Soho House que l’on retrouve à Londres, Berlin, Los Angeles ou encore Amsterdam. À savoir : un club privé réservé à ses membres – lesquels s'acquittent d’une cotisation annuelle de 1 800 € qui ne comprend pas le prix d’une clé – et leurs proches. Faisant du secret sa marque de fabrique, l’opérateur hôtelier anglais met un point d’honneur à interdire les téléphones portables, ainsi que les photos, dans le lobby principal et le restaurant. « Des espaces sont dédiés pour prendre les appels, confie un habitué des lieux. Quand Rihanna vient à Paris, il n’est pas rare de la croiser dans cet hôtel hydride. » De sources concordantes, la Compagnie de Phalsbourg reste impliquée dans la gestion de l’établissement, auprès d’Amundi Immobilier et de l’enseigne anglaise.
Process ralentis ou en stand-by
Cette transaction sur le Soho House Paris fait quelque peu figure d’exception dans le paysage de l’investissement hôtelier de la capitale en 2022. Outre la cession récente du Westin Paris Vendôme pour 650 M€ – laquelle n’a pas été un long fleuve tranquille (lire l’article publié sur CFNEWS IMMO) – plusieurs process sont ralentis ou en stand-by. Et ce malgré des indicateurs positifs pour cette typologie de marché. Ainsi en est-il, d'après nos informations, du California à Paris remis à la vente après une première négociation avortée ; du Courtyard Porte de Versailles ; du Méridien Porte Maillot, détenu par Henderson Park, ou encore de l'Hyatt Regency Paris Etoile, également situé Porte Maillot. Des actifs qui, de par leur taille et/ou du niveau de capex à injecter, demandent une expertise certaine et très souvent, un recours à l'effet de levier, sachant que les marges évoluent, sur le marché du real estate, entre 90 et 190 pdb pour un même actif.
Mon Beau Buchelay rétrocédé pour 110 M€ AEM
Outre la cession du Soho House Paris, la Compagnie de Phalsbourg – avec Ortis Invest – a récemment rétrocédé le retail park Mon Beau Buchelay (Yvelines) en septembre dernier. Ce site à l’architecture futuriste et à ciel ouvert – occupé à 94 % et développant 34 500 mètres carrés dans les Yvelines – a été repris full equity par BNP Paribas REIM, pour le compte de son véhicule SCPI Accimmo Pierre. Le montant de la transaction est tenu confidentiel, mais il s'évalue à moins de 110 M€ AEM d'après nos sources. Le taux de rendement exact n'est pas dévoilé, mais il est supérieur à 5 % selon nos informations. À noter : la Compagnie de Phalsbourg continue à gérer le retail park et va poursuivre la commercialisation des cellules restantes.