La pandémie du covid-19 va modifier les futurs contrats immobiliers.
L’annulation pure et simple des loyers. Il s’agit de la mesure la plus attendue et la plus demandée par les locataires, qui leur permet, avec la mise en place du chômage partiel, d’échapper à ce qui représente souvent leurs deux postes de dépenses les plus importants : les salaires et l’immobilier. L’État a demandé l’annulation des loyers des TPE dont l’activité chuterait sous les 70 % suite au Covid-19 mais, parfois avant cette annonce, des bailleurs ont pris position pour cette mesure. C’est notamment le cas de la Compagnie de Phalsbourg, de Carmila ou encore de Ceetrus. Si elle prend tout son sens dans le retail, car la fermeture des commerces non essentiels a été imposée, cette mesure ne s’entend pas toujours dans le bureau, le télétravail permettant de plus en plus de pallier l’arrêt de l’activité. Pour autant, certains propriétaires ont mensualisé les loyers de leurs utilisateurs, à l’instar de, notamment, Primonial REIM, ou encore Gecina.
Les bailleurs ont apporté des réponses à court terme
Si l'annulation ou le report des loyers semblent nécessaires pour les locataires qui ont perdu la grande majorité, parfois même la totalité, de leurs revenus, ces mesures sont surtout difficilement évitables, comme le rappelle Catherine Saint Geniest, avocate associée du cabinet Jeantet : « Les huissiers n'échappent pas au confinement et ne délivrent que quelques actes très urgents, il n'y a donc, quoiqu'il en soit, pas de recouvrement des loyers possible aujourd’hui. » Outre ces suspensions ou ces étalements de loyers, les bailleurs ont pris d’autres mesures à court terme, notamment en ce qui concerne leur obligation de sécurisation des locaux. Le complexe Cœur Défense a par exemple été fermé par ses propriétaires, Amundi Immobilier, Crédit Agricole Assurances et Primonial REIM. Mais, si la fermeture des tours IGH et autres bâtiments est prévue dans les contrats dans le cadre de sinistres ou de vétusté par exemple, elle ne l’est pas pour cause de pandémie, et pose une question essentielle : le loyer doit-il être annulé ? Les bailleurs sont en attente d’éclaircissement dans ce qui est aujourd’hui un flou inédit. Pour autant, « des discussions sont en cours avec les assurances, poursuit Catherine Saint Geniest, afin qu'elles prennent en charge au moins une partie des conséquences de la situation actuelle ».
La pandémie a, au minimum, gelé les opérations en cours
Parallèlement à la gestion du patrimoine existant en ces temps de crise sanitaire, les gestionnaires et les investisseurs immobiliers s’interrogent légitimement sur leurs deals en cours. Du côté des transactions locatives, les opérations sont au minimum gelées, parfois décalées en attendant d’avoir une visibilité plus clair sur l’avenir. Seules les signatures les plus avancées peuvent se concrétiser, et de manière dématérialisée. Du côté de l’investissement, l’industrie est aujourd’hui quasiment à l’arrêt. « Les acquisitions qui n'en étaient qu'à leur début sont, pour une grande partie, suspendues jusqu'à nouvel ordre, voire annulées, livre Catherine Saint Geniest, mais les investissements en phase finale peuvent parfois se conclure à distance. » Le lancement de nouvelles opérations d’investissement, et donc d’arbitrages, est quant à lui très limité aujourd’hui. Il est difficilement imaginable de réaliser les diagnostics dans les conditions actuelles, les administrations tournent également au ralenti et les délais pour obtenir les documents légaux sont quoiqu’il en soit rallongés de plusieurs semaines.
Un nouveau risque à intégrer pour mieux protéger
La question est désormais de savoir si les différentes opérations immobilières reprendront là où elles se sont arrêtées quand la pandémie sera passée. « Y aura-t-il encore le cash nécessaire aux investissements ? », s’interroge l'avocate. Tout dépendra des réponses apportées aux questions précédemment évoquées, qui permettront, ou non, de poursuivre l’année immobilière 2020, qui enregistrait déjà plus de 8 Md€ investis avant la crise (lire ci-dessous). Le Covid-19 laissera de toute manière sa trace dans les futurs baux et dans les futurs actes signés. « La prochaine pandémie ne sera plus couverte par la clause "d’imprévisibilité" comme c'est le cas aujourd'hui », conclut Catherine Saint Geniest.