Imaginée par JP Viguier, la tour Majunga est l'une des plus modernes de La Défense. © JP Viguier
Le Lumière, Majunga, Eqho, Crystal Park, CBX, Le Cristalia et maintenant PB6. C’est simple, hormis la transaction sur le portefeuille Terreïs signée par Swiss Life pour 1,7 Md€, tous les plus grands deals du premier semestre sur le marché des bureaux ont été remportés par des investisseurs asiatiques, quasi tous sud-coréens, comme le montre notre tableau ci-dessous. En trois ans, leur progression sur le marché est fulgurante (+360 % selon notre graphique ci-dessous) et s'inscrit comme la plus grande tendance de l'année. Selon les données de CFNEWS IMMO, sur le seul premier semestre, 4,9 Md€ ont ainsi été déployés sur le marché des bureaux de Paris et ses environs, dont un peu plus de 4 Md€ pour les seuls sud-coréens. Du jamais vu depuis l’arrivée des investisseurs asiatiques sur le marché de l'immobilier français. « Cela fait déjà plusieurs années que les capitaux sud-coréens sont déployés sur le marché immobilier, rappelle Nils Vinck, responsable du capital markets chez Cushman & Wakefield. À l’exception notable des acquisitions réalisées par le fonds souverain NPS, l’un des premiers dossiers d’envergure était le 115 Montmartre, acquis par Korea Post à un taux de 3,10 % en 2016. Mais 2019 marque un vrai tournant, avec une accélération jamais vue de leurs investissements, notamment à La Défense avec trois transactions d’envergure, la tour Majunga, la tour Eqho et la tour CBX. Deux grandes raisons expliquent cette accélération : l’importance des liquidités disponibles dans le contexte d’un marché local trop restreint et le bénéfice d’un hedge sur leur monnaie qui leur offre un avantage compétitif en zone euro. »
Du jamais vu
Pour la première fois, Paris a attiré plus de capitaux sud-coréens que Londres décoté par son Brexit et incontestablement, ceux qui peuvent s’en réjouir, ce sont les asset managers ayant depuis longtemps approché ce profil d’investisseurs. En particulier ceux s'étant doté d'un bureau à Séoul, comme La Française REP, L'Étoile Properties ou Hines. D'autres se sont aussi bien distingué, comme Primonial REIM, Balzac REIM ou BNP Paribas REIM. Une stratégie payante, dont ils peuvent récolter les fruits cette année, notamment grâce à leur parfaite connaissance du type d’actifs recherché par ces investisseurs : des immeubles récents, valorisés minimum 200 M€, bien situés à Paris et ses environs, avec une très nette appétence pour le Croissant Ouest. Mono-locataires de préférence, même s’ils ont élargi leur spectre à la multi-location pour répondre à leur frénésie d’investissement. Les sud-coréens ont été jusqu’à débourser 12 700 €/m2 ce semestre pour s’offrir la tour Majunga à La Défense (850 M€), du jamais vu dans le quartier. L'an passé, ils avaient accepté de mettre sur la table 17 500 €/m2 dans le Triangle d'Or pour le 16 Washington. Quant au rendement, il tourne généralement autour de 4 %. Le 115 Montmartre fait figure d’exception, car Korea Post n’a pas eu besoin de syndication.
Une activité plus modeste au second semestre
Dans les sept opérations de plus de 100 M€ recensées dans notre tableau, un seul singapourien se distingue : le fonds souverain GIC, qui vient de signer auprès de CNP Assurances, la tour PB6 à La Défense, occupée par EDF, pour près de 550 M€ selon Business Immo. L'an passé, ce fonds s'était déjà approprié une tour dans le premier quartier d'affaires d'Europe, Ariane, payée 465 M€. Faut-il compter sur un second semestre tout aussi actif pour les investisseurs originaires de Corée du Sud ? Pas sûr, même si plusieurs dossiers sur le marché correspondent à leurs critères d’investissement. « Nous restons attentifs à ce qui va se passer au second semestre car ils ont déjà déployés beaucoup de capitaux sur le marché français et ces investissements doivent maintenant être syndiqués, explique Nils Vinck. Leur activité sera en conséquence probablement plus modeste au second semestre, même si leur appétit reste fort et nous verrons probablement des fonds plus secondaires arriver sur le marché ce semestre. » D'autres investisseurs du continent devraient aussi prouver leur appétit pour le marché français, notamment les fonds hongkongais. Il se murmure qu'ils seraient les prochains à fortement investir l'Hexagone, motivés par les asset managers français.